
lundi, 4 novembre 2019
Beaucoup de ce que Balzac disait dans Illusions perdues semble être vraie aujourd’hui. C’est comme s’il parlait directement avec nous à travers les siècles. Le sentiment qu’il a exprimé à propos du journalisme fait écho à de nombreuses critiques qui pourraient être formulées au XXIe siècle.
“Le journalisme est un enfer, un abîme d’iniquités, de mensonges, de trahisons, ne peut traverser et d’où l’on ne peut sortir pur . . . “(Balzac)
Comparez cela avec ce que Peter Oborne a écrit plus récemment: «C’est effrayant. The Mail, The Times à la BBC et à ITN, tout le monde colporte les mensonges et les diffamations de Downing Street. Ils transforment leurs lecteurs en dupes. » (Open Democracy, 22 octobre 2019)
Il y a aussi des parallèles d’aujourd’hui dans la manière dont Balzac décrit la corruption et le système de classes de la société française du début du 19ème siècle, non seulement à Paris mais dès le début – la différence entre ceux qui vivent à Angoulême, la ville haute et les plus commerçants de la ville basse, l’Houmeau.
Mais je dois vraiment dire que Illusions perdues était également une très bonne lecture, avec des échos de Dickens, peut-être. Bien que Balzac ait plus de philosophie et moins d’humour. Une caractéristique dont je me souviens de la lecture du Père Goriot est la description détaillée faite par Balzac des bâtiments, des lieux et des vêtements de ses personnages. Je suis sûr que cela aurait été fatigant quand j’étais plus jeune, mais maintenant je trouve fascinant d’aider à imaginer de manière vivante la vie telle qu’elle a été vécue dans la première partie du XIXe siècle. Henry James a écrit que Balzac est notre plus grande autorité sur la nature humaine, après Shakespeare.
Illusion Perdues est en trois parties. La première s’intitule Les Deux Poètes et nous emmène à Angoulême vers 1820. Le premier poète est David Sechard, qui est revenu à la fin de son éducation à Paris. Cette éducation crée immédiatement un fossé entre lui et son père, L’ours, qui ne sait ni lire ni écrire. Lorsque David reprend l’imprimerie de son père, Lucien Chardon, fils du pharmicien et deuxième poète, devient son «pote».
Nous rencontrons progressivement d’autres personnages, dont Père Sechard, Eve, la soeur de Lucien et bientôt Mme Sechard, M. Sixte du Châtelet et Mme de Bargeton ou Louise ou Mme de Negrepelisse.
Tandis que David préfère se concentrer sur son rôle d’inventeur, cherchant une forme de papier bon marché, Lucien est entraîné dans la classe supérieure de Madame de Bargeton où il est capable de montrer ses talents poétiques. Il est ébloui par les accoutrements des gens plus nobles.
Après le premier des deux duels, Madame de Bargeton emmène Lucien à Paris dans une vie complètement différente. Nous sommes dans la deuxième partie du livre. Rompant avec Louise, Lucien se lie d’amitié avec la belle jeune actrice Coralie et rencontre des journalistes, des écrivains, des éditeurs et des non-conformistes de la rue de quatre vents. A Paris, Lucien Chardon, prendra bientôt le nom de sa mère, Rubempré.
Mais fils d’un chimiste peut-il jamais bien réussir dans les classes cultivées de Paris? Avec ces “gens supérieurs”?
Tout commence à aller mal pour Lucien. Ses anciens amis l’attaquent et Lucien étais blessé dessus dans un duel avec Michael. Coralie est ciblée avec de mauvaises critiques de son jeu. Et aussi, sans argent, elle perd le soutien des claqueurs. Elle tombe malade et meurt aux côtés de Lucien et de Bérénice, qui vivent tous dans une pauvreté extrême.
La troisième partie du livre voit Lucien revenir à Angouleme. N’ayant pas d’argent, il doit le faire principalement à pied. Nous apprenons ensuite l’histoire de David et d’Eve depuis le départ de Lucien de Paris. David continua à expérimenter avec le fabrication de papier pendant qu’Eve mettait son sens financier au service de l’imprimerie, jusqu’à ce que les dettes de Lucien obligent tout à changer. Avant le retour de Lucien, ancien ami de Lucien, Arthez, écrit une lettre puissante et émouvante à Eve. Si nous voulons comprendre Lucien, il suffit de lire cette lettre d’Arthez à Eve.
Les illusions? Sommes-nous condamnés à perdre nos illusions une fois plongés dans le monde réel, le monde des adultes? J’espère que non.
Balzac avait un buste de Napoléon où il écrivait et il disait que ce que Napoléon ne pourrait pas réaliser avec l’épée, il le ferait avec la plume. Au cours de sa vie, la France a connu de profonds changements à la suite de la révolution et de l’empire. L’art de Balzac s’accorde et reflète cette réalité changeante.
Illusions perdues illustrent la corruption, le bien, le mal, l’espoir, l’ambition et le désespoir dans la ville et dans les provinces. C’est un roman complexe et brillant que j’espère revoir prochainement. Un chef-d’œuvre. Un classique des classiques.