La première chose à dire à propos de Persépolis de Marjane Satrapi est qu’il s’agit d’un roman graphique et qu’il m’a montré à quel point la lecture d’un roman graphique pourrait être une expérience riche. La lecture de ce livre m’a fait réaliser qu’un mélange d’art et de littérature peut améliorer le récit en transmettant des émotions, des séquences d’action et des détails qui peuvent être difficiles à décrire en mots seuls.
Les indices visuels ajoutent de la profondeur. La combinaison de texte et d’images rend les concepts complexes ou abstraits plus faciles à saisir. Et bien sûr, une image permet à l’auteur de faire quelque chose qui serait difficile avec des mots seuls : montrer la réaction de plusieurs personnes en même temps. Qui aurait deviné que la combinaison de l’art et du texte créerait un médium aussi riche et captivant. Toute personne qui a des doutes sur la lecture d’un roman graphique devrait lire ce livre. Au fur et à mesure que le livre progresse, la capacité du lecteur à lire et à comprendre les images augmente également.
Persépolis est une histoire émouvante et puissante qui commence avec l’enfance de l’auteur en Iran à l’approche de la Révolution Islamique. À travers des expériences personnelles, Marjane Satrapi offre une perspective unique sur les bouleversements politiques et la transformation culturelle qui ont eu lieu dans son pays au cours de ces années dangereuses. L’auteur commence le livre en tant que petite fille et nous la voyons devenir adulte. Comme elle le fait, il en va de même pour son utilisation de la langue. Les dessins de Satrapi sont simples mais expressifs, et ils aident vraiment à donner vie à l’histoire
Initialement publié en français en 2000, le livre a été traduit en plusieurs langues, dont l’anglais. Marjane Satrapi est née à Rasht, en Iran, en 1969. Elle a grandi à Téhéran dans une famille iranienne de la classe moyenne supérieure et a fréquenté l’école de langue française, le lycée Razi. Élevée dans une famille libérale, elle s’est exposée aux voies occidentales à un jeune âge.
Les deux parents étaient politiquement actifs et ont soutenu des causes de gauche contre la monarchie du dernier Shah. Ils voulaient une démocratie, selon les lignes occidentales. À mesure que les manifestations augmentaient, le Shah a fait de plus en plus de concessions, et le pays semblait s’orienter vers la démocratie libérale, soutenue par les parents de Marjane Satrapi. Ils n’étaient donc pas du tout préparés à la révolution islamique qui a suivi, un événement qui a tout changé. Les femmes ont été forcées de porter des hijabs. Les règles changeantes à l’école ont rendu la vie presque impossible à Marjane Satrapi..
La guerre prolongée avec l’Irak est arrivée, rendant la vie de plus en plus dangereuse pour ceux qui vivent à Téhéran. De plus en plus d’opposants de gauche au Shah ont été exécutés, y compris son oncle. Elle a commencé à remettre en question sa foi, et il a finalement été décidé, en 1984, que Marjane devrait quitter l’Iran pour l’école française de Vienne. En 1988, elle retourne en Iran pour terminer ses études secondaires, une personne très différente. Après avoir obtenu son diplôme, elle s’est installée à Paris pour étudier l’art.
L’histoire est racontée à travers la voix unique et puissante de Marjane Satrapi, avec des illustrations en noir et blanc simples mais efficaces qui capturent ses expériences. À travers son récit, Satrapi illustrent la vie quotidienne d’une famille iranienne à une époque de bouleversements politiques, où les gens ont été forcés de naviguer entre les pressions de la tradition et les exigences rigoureuses d’un nouveau régime.
Je me souviens de deux autres livres français qui racontent des Iraniens qui viennent à Paris. Le premier est Desorientale de Négar Djavadi (lu, novembre 2021) qui parle de trois générations de sa famille, en particulier de son père Darius qui faisait également partie de l’opposition de l’aile gauche au Shah. Deuxièmement, Comment peut-on etre francais ? par Chahdortt Djavann (lu, mars 2019) qui est un autre immigrant iranien en France et raconte, entre autres choses, la lutte de l’auteur pour apprendre le français.
L’une des forces de Persépolis est sa capacité à transmettre des événements politiques et historiques complexes d’une manière pertinente et humaine. L’auteur n’hésite pas à montrer les contradictions et les conflits au sein de la société iranienne, et elle dépeint les différentes perspectives et motivations des personnes qui l’entourent avec sensibilité, nuance et humour.
En 2007, Persépolis a été adaptée en film d’animation. Le film a été réalisé par Satrapi et Vincent Paronnaud, et il a remporté le grand prix du jury au Festival de Cannes 2007.
Satrapi est une voix puissante et importante dans la littérature et la culture contemporaines. Son travail témoigne du pouvoir de l’art de raconter des histoires, de défier l’injustice et d’inspirer le changement. Au cours des récents bouleversements de jeunes filles en Iran, Marjane Satrapi a été une voix importante à la télévision française et anglaise, offrant son soutien à ceux qui protestent.